Christian Schiaretti
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Biographie
La formation
Christian Schiaretti fait des études de philosophie tout en œuvrant pour le théâtre où il occupe les postes les plus divers : accueil, technique, enseignement… Après le Théâtre-école de Montreuil, le Théâtre du Quai de la Gare, il crée le Théâtre de l’Atalante à Paris. Parallèlement, il suit les classes de Antoine Vitez, Jacques Lassalle, Claude Régy comme « auditeur libre » au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique.
Les débuts
Durant les huit années passées en compagnie, il met en scène des œuvres de Philippe Minyana, Roger Vitrac, Oscar Panizza, Sophocle, Euripide… Deux spectacles en particulier ont attiré l’attention de la profession et de la critique : Rosel de Harald Mueller, avec Agathe Alexis, créé en 1988, et Le Laboureur de Bohême de Johannes von Saaz, avec Jean-Marc Bory et Serge Maggiani.
La Comédie de Reims, 1991-2002
En 1991, il est nommé directeur de la Comédie de Reims, Centre Dramatique National. Il était alors le plus jeune directeur d’une telle institution. Très vite il a voulu que la notion de « maison théâtre » reprenne tout son sens, c’est-à-dire celui d’une maison où habitent des artistes. Ainsi s’est formée, à Reims, une troupe de douze comédiens permanents, la première à voir le jour depuis les riches heures du début de la décentralisation. Le travail au plateau est quotidien, intensif et libre. Après avoir exploré l’Europe des avant-gardes (Brecht, Pirandello, Vitrac, Witkiewicz), la nécessité, le besoin de l’auteur se sont affirmés. Alain Badiou, philosophe, a été associé à l’aventure rémoise. Au Festival d’Avignon, la création de Ahmed le subtil, puis Ahmed philosophe, Ahmed se fâche, Les Citrouilles, sont pour Badiou, Schiaretti et la troupe de la Comédie, l’occasion d’interroger les possibilités d’une farce contemporaine.
Après trois années de cette fructueuse expérience, Christian Schiaretti et la troupe se tournent vers la riche langue du XVIIe siècle avec Polyeucte, La Place Royale de Corneille et Les Visionnaires de Jean Desmarets de Saint-Sorlin, présentés dans de nombreuses villes pendant plusieurs saisons. Avec Jean-Pierre Siméon, poète associé qui a ensuite accompagné la trajectoire artistique de la Comédie de Reims, Christian Schiaretti questionne le poème dramatique. Le Théâtre et la Poésie ne sont-ils pas les lieux manifestes de cette question ? Quatre pièces sont ainsi créées qui sont au cœur de ce questionnement : D’entre les morts, Stabat mater furiosa, Le Petit Ordinaire (cabaret), La Lune des pauvres. En 1998, ils conçoivent ensemble une manifestation autour de la langue et de son usage intitulée Les Langagières. Au cours de la saison 1999-2000, Christian Schiaretti a présenté au Théâtre national de la Colline, Jeanne, d’après Jeanne d’Arc de Péguy, avec Nada Strancar. En 2001-2002, il poursuit la collaboration avec la comédienne en mettant en scène Mère Courage et ses enfants de Bertolt Brecht à la Comédie de Reims, au TNP et au Théâtre national de la Colline à Paris. Ce spectacle recevra le Prix Georges-Lerminier 2002 du Syndicat professionnel de la Critique.
Le TNP
En janvier 2002, il est nommé directeur du Théâtre National Populaire. Au printemps 2003, il a recréé Le Laboureur de Bohême, avec Didier Sandre et Serge Maggiani et repris Jeanne d’après Charles Péguy, suivi à l’automne 2003 de L’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht et Kurt Weill.
En 2004, il crée à la Comédie-Française Le Grand Théâtre du monde suivi du Procès en séparation de l’Âme et du Corps de Pedro Calderón de la Barca, repris au TNP.
Il a créé en 2005, Père de August Strindberg et L’Annonce faite à Marie de Paul Claudel. En 2006, à l’invitation de Théâtre Ouvert, il a mis en espace Ervart ou les derniers jours de Frédéric Nietzsche de Hervé Blutsch, créé au TNP et repris à Théâtre Ouvert.
En novembre 2006, il aborde William Shakespeare avec Coriolan. La pièce, reprise en tournée au Théâtre Nanterre-Amandiers en 2008, a reçu le Prix Georges-Lerminier 2007 décerné par le Syndicat professionnel de la Critique au meilleur spectacle créé en région, le Prix du Brigadier 2009 et le Molière du Metteur en scène et le Molière du Théâtre public, 2009.
Entre 2007 et 2009, il crée avec les comédiens de la troupe du TNP, 7 Farces et Comédies de Molière : Sganarelle ou le Cocu imaginaire, L’École des maris, Les Précieuses ridicules, La Jalousie du Barbouillé, Le Médecin volant, Le Dépit amoureux, L’Étourdi ou les contretemps. En 2010, une tournée internationale au Maroc et en Corée du sud est organisée qui rencontrera un accueil triomphal.
À l’automne 2007, il poursuit son travail sur Brecht, avec Jean-Claude Malgoire et Nada Strancar, en présentant : Nada Strancar chante Brecht/Dessau. En mars 2008, il crée l’événement en montant Par-dessus bord de Michel Vinaver, joué pour la première fois en France dans sa version intégrale. Pour cette mise en scène il reçoit le Grand Prix du Syndicat de la Critique, pour le meilleur spectacle de l’année 2008.
En septembre 2009, la création de Philoctète de Jean-Pierre Siméon (variation à partir de Sophocle), à l’Odéon-Théâtre de l’Europe, marque le retour de Laurent Terzieff à L’Odéon.
Après la présentation en novembre 2010, de La Messe là-bas de Paul Claudel, au Théâtre Les Gémeaux à Sceaux avec Didier Sandre, il s’attaque à trois grandes œuvres du répertoire espagnol du XVIIe siècle. Le Siècle d’or, un cycle de trois pièces : Don Quichotte de Miguel de Cervantès, La Célestine de Fernando de Rojas, Don Juan de Tirso de Molina sont présentées au TNP en alternance et repris au Théâtre Nanterre-Amandiers.
C’est également en 2010 qu’il reprend La Jeanne de Delteil d’après le roman de Joseph Delteil, avec Juliette Rizoud dans le rôle-titre. Ce spectacle ne cesse de tourner depuis.
En mai 2011, la création à La Colline–Théâtre national du diptyque Mademoiselle Julie et Créanciers, permet à Christian Schiaretti de revenir à Strindberg. En juin 2011 débute l’ambitieux projet du Graal Théâtre de Florence Delay et Jacques Roubaud qui consiste à monter jusqu’à fin 2014 la légende du Graal, soit les cinq premières pièces : Joseph d’Arimathie, Merlin l’enchanteur, Gauvain etle Chevalier Vert, Perceval le Gallois, Lancelot du Lac, en réunissant les troupes et les moyens du TNP et celles du TNS.
En 2011, après quatre saisons hors les murs et au Petit théâtre ouvert en 2009, le Grand théâtre ouvre ses portes le 11 novembre — dans une configuration architecturale nouvelle et de nouvelles orientations du projet artistique —, avec Ruy Blas de Victor Hugo.
À l’automne 2012, Christian Schiaretti interroge de nouveau l’histoire contemporaine avec Mai, juin, juillet de Denis Guénoun, spectacle repris au Festival d’Avignon 2014.
En 2013, à l’occasion du centenaire de la naissance de Aimé Césaire, il rend hommage à ce grand poète par la création de Une Saison au Congo, en tournée au Théâtre Les Gémeaux à Sceaux et à Fort-de-France en Martinique. Ce spectacle a reçu le Prix Georges-Lerminier 2014 du Syndicat professionnel de la Critique.
En janvier 2014, il revient à Shakespeare avec Le Roi Lear avec, dans le rôle-titre, Serge Merlin, créé au TNP, présenté au Théâtre de la Ville, Paris et au Bateau Feu, Dunkerque pour la réouverture de la scène nationale.
La création de la dernière pièce de Michel Vinaver, Bettencourt Boulevard ou une histoire de France, en novembre 2015 et une nouvelle opportunité de travailler un texte de cet immense dramaturge. Le spectacle sera repris au Théâtre national — La Colline, Paris et à la Comédie de Reims. En 2016, Lambert Wilson lui demande de mettre en scène son récital Wilson chante Montand. A trois élaborations collectives, Électre, Antigone et Ajax, variations à partir de Sophocle de Jean-Pierre Siméon et à une fatrasie collective, Ubu roi (ou presque) de Alfred Jarry, Christian Schiaretti travaille avec ses comédiens fidèles en leurs donnant les « règles du jeu ». Le berceau de la langue (La Chanson de Roland, Le Roman de Renart, Tristan et Yseult, Le Franc-Archer de Bagnolet), cycle élaboré avec six comédiens de l’ex-permanence artistique du TNP.
Dans un esprit de mutualisation, Christian Schiaretti associe Robin Renucci et Les Tréteaux de France pour créer des formes adaptées à un théâtre de tréteaux et ainsi aux tournées. Trois spectacles voient le jour : une version de Ruy Blas (2012), L’École des femmes (2013) et La Leçon (2014).
Les mises en scène à l’opéra
La Voix humaine de Jean Cocteau, 2018
Orlando furioso de Antonio Vivaldi, 2017
Une Italienne à Alger de Gioachino Rossini, 2016
Pelléas et Mélisande de Claude Debussy, 1996, 2015 et 2018
Castor et Pollux de Jean-Philippe Rameau, 2014
Jules César de Georg Friedrich Haendel, 2011
La Créole de Jacques Offenbach, 2009
La Tosca de Giacomo Puccini, 2008
Le Barbier de Séville de Giovanni Paisiello et de Gioachino Rossini, 2005
Eugène Onéguine de Piotr Illitch Tchaïkovski, 2003
L’Échelle de soie de Gioachino Rossini, 2001
Ariane à Naxos de Richard Strauss, 2001
Hänsel et Gretel opéra pour enfants de Engelbert Humperdinck, 1998
Madame Butterfly de Giacomo Puccini, 1997
L’enseignement à l’École Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre
Attaché à la mise en œuvre d’une politique pédagogique, Christian Schiaretti a mis en place dès son arrivée à Lyon, une étroite collaboration avec l’ENSATT. Il y a notamment mis en scène Utopia d’après Aristophane, en 2003. L’Épaule indifférente et la Bouche malade de Roger Vitrac, en 2004. En 2006, Le Projet Maeterlinck, (Les Aveugles, Intérieur, La Mort de Tintagiles) avec la 65e promotion. En 2007, avec la 66e promotion, Les Visionnaires de Jean Desmarets de Saint-Sorlin. En 2009, Hippolyte et La Troade de Robert Garnier, avec la 68e promotion. Aujourd’hui, il codirige le département Mise en scène de l’école.
Christian Schiaretti est président des Amis de Jacques Copeau. Il a été président de l’Association pour un Centre Culturel de Rencontre à Brangues et a présidé le SYNDEAC de 1994 à 1996.
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Ses écrits
Des acteurs dans les théâtres
A quelques années de nous, un amateur éclairé s’étonnerait sans doute de nos débats sur la présence nécessaire d’acteurs dans nos théâtres. La question lui paraîtrait certainement confinée à la tautologie : autant s’interroger sur la présence de poissons dans la mer ou de feuilles dans les arbres. Comment s’expliquer qu’après soixante ans de décentralisation, le territoire national soit équipé d’autant d’outils dont aucun ne peut témoigner d’une permanence artistique digne de ce nom.
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Le théâtre comme institution
Notre problème, c’est de réussir à recréer non pas un dialogue mais une patience générationnelle. Faire que les plus âgés regardent avec intérêt les jeunes. Et, que les jeunes écoutent les plus âgés.
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Du metteur en scène au directeur du TNP
Entretien réalisé par Bérénice Hamidi-Kim le 2 octobre 2009, retranscrit par Magali Le Ny, repris par Marion Denizot et relu par Christian Schiaretti.
Le TNP se situe aujourd’hui à Villeurbanne, mais ce qui m’intéresse, c’est l’énigme que me pose les trois mots qui composent son sigle.
Théâtre
, parce que c’est un métier et que le TNP doit être un représentant aigu de sa discipline. « National », parce que c’est un théâtre qui porte la célébration d’un génie propre à la langue française au travers de son répertoire et de son élaboration nouvelle. Et enfin « populaire », parce que c’est simple, au sens où l’on dit des gens généreux qu’ils le sont.Lire l’intégralité du texte (PDF, 188 ko)
Du metteur en scène au directeur du TNP
Entretien réalisé par Bérénice Hamidi-Kim le 2 octobre 2009, retranscrit par Magali Le Ny, repris par Marion Denizot et relu par Christian Schiaretti.
Le TNP se situe aujourd’hui à Villeurbanne, mais ce qui m’intéresse, c’est l’énigme que me pose les trois mots qui composent son sigle.
Théâtre
, parce que c’est un métier et que le TNP doit être un représentant aigu de sa discipline. « National », parce que c’est un théâtre qui porte la célébration d’un génie propre à la langue française au travers de son répertoire et de son élaboration nouvelle. Et enfin « populaire », parce que c’est simple, au sens où l’on dit des gens généreux qu’ils le sont.Lire l’intégralité du texte (PDF, 226 ko)
La refondation du TNP
Interview de Christian Schiaretti pour les Etats Provisoires du Poème XI
L’intitulé de ce numéro d’Etats provisoires du poème est «Refaire, renaître, refonder». Lequel ou lesquels de ces termes te paraissent le ou les plus appropriés pour caractériser la mutation du TNP sous ta direction depuis 10 ans ?
D’une façon générale, je n’aime pas beaucoup le préfixe « re », même s’il est fondateur dans le théâtre où il est clair pour chacun que l’on répète et représente. Je m’en méfie car c’est un point de vue d’orgueil ; le point de vue d’un démiurge extérieur qui déciderait d’indiquer le chemin, un passé rédempteur dont il aurait le secret.
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Le théâtre est-il révolutionnaire ?
Je crois n’avoir vécu qu’un seul événement « révolutionnaire » au sens d’un bouleversement. En 1974, fils d’ouvrier et étudiant en philosophie, je travaille comme coursier. Chargé d’apporter un paquet dans un lieu en travaux – le futur théâtre des Bouffes du Nord –, je découvre des Arabes en train chanter l’Internationale…
Je m’assieds à côté d’un monsieur qui m’explique qu’il s’agit d’une pièce de théâtre, Mohamed, prends ta valise, que ce sont des acteurs du Théâtre national d’Alger et que lui-même est Kateb Yacine ! Ma vie bascule. S’ouvre à moi un champ dont je ne soupçonnais pas l’existence. J’associe alors le théâtre à la pensée.
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Le théâtre national populaire aujourd’hui
Je ne me suis jamais accommodé de la notion verticale de carrière. Jeune, je lui préférais la notion de légende. Alimenté sans doute par les exemples passés avec leurs lots de pathétiques résolutions. Cela me distingua de l’esthétique imposée à ma génération, le ridicule en prime : je n’avais jamais inscrit le TNP dans mes perspectives.